jeudi 28 juillet 2011

Règle d'or sur les déficits : une réforme nécessaire mais insuffisante

Au moment où les américains discutent très sérieusement du montant de la dette de leur pays, d'une anticipation par les marchés d'un risque de défaut de la Grèce et d'un débat ardu en Allemagne, au sein du Parlement, sur le dernier accord européen, il parait normal de se poser la question de nos déficits et de notre dette en termes politiques. Il nous semble donc de mauvaise politique que les ténors de la gauche jouent l'indignation sur ce sujet.

1°) La tendance des trentes dernières années en matière de dette est elle "soutenable" ? Non

Au delà des soubresauts de l'actualité récente, le bon critère c'est celui de la "soutenabilité" c'est à dire la capacité de l'Etat à couvrir ce niveau par un surplus budgétaire. Autrement dit, il s'agit d'éviter le recours à un jeu à la "Ponzi" (dont l'affaire Madoff est le dernier exemple) dans lequel on s'endette pour payer les emprunts précédents. Le critère de second ordre est bien entendu la solvabilité (la capacité à faire face à ses échéances), qui est d'actualité pour la Grèce.

Autrement dit le bon niveau de dette c'est celui qui permet à l'Etat de ne pas avoir à ajuster sa politique budgétaire tout en assurant bien sur sa solvabilité.

Comment a évolué la dette depuis trente ans :

- elle n'a cessé d'augmenter : elle est de 1591 Milliards € fin 2010 (contre 92 Milliards € en 1980)* et même en % du PIB elle n'a jamais cessé d'augmenter. Ce n'est donc pas une affaire de droite ou de gauche.
* source : chiffres officiels transmis à la CEE

- aucun modéle économique ne montre le caractère soutenable de la dette (voir Roubini dés 2002 et les études de l'Insee). Celà signifie, que les dépenses de l'Etat procurent de moins en moins de croissance et de recettes, que les investissements publiques ont un retour sur investissement difficile à mesurer.

-des tendances structurelles sont à l'oeuvre qui risquent d'augmenter la dette à l'avenir : la démographie en est la principale raison avec ses effets sur les dépenses de santé et de retraite.

Or, un niveau d'endettement excessif  a des effets bien connus de l'histoire économique : elle détourne l'épargne de l'économie de marché (les théoriciens appellent celà "l'effet d'éviction"). En général, il s'en suit que l'épargne ne va pas aux entreprises mais se loge dans des "rentes". Trés souvent il s'en suit une hausse des taux d'interêt, de l'inflation et un risque de défaut de paiement. L'angleterre actuelle est dans ce cas. Le seul rempart provisoire est la rigueur de la politique monétaire : on oublie souvent de dire que c'est celle de la BCE qui nous a préservés jusque là de ce risque...sauf si comme récemment on l'a vu on la force à acheter des dettes d'Etat compromises.

2°) Quelle réforme constitutionnelle ?

Auparavant, il faut rappeler qu'il existe de tous temps cinq façons de diminuer sa dette :
- spolier celui qui vous a prêté : c'est ce que fit l'ancien régime en France, l'Union soviétique après 1917
- dire à son prêteur, que l'on souhaite un arrangement : vulgairement parlant, on annule une partie de la dette : c'est actuellement ce qui se joue en Grèce. En dernier ressort, ce sont bien les élus qui doivent décider si oui ou non ils consentent à l'Etat ce point et en toute logique c'est du rôle du parlement.
- faire marcher la machine à billet : cela s'appelle l'inflation dont on sait qu'elle est pour les ménages facteurs d'appauvrissement
- restructurer les dépenses. On ne peut pas réellement dire que la France s'est attaquée au sujet même si elle l'a amorcé.
- accroître les impôts.

La réforme sur la "règle d'or" doit fixer le niveau de la dette en montant mais au niveau européen

- une première étape : plutôt que de règles d'or, il me semblerait plus utile que chaque année, une loi spécifique sur la dette soit proposée aux parlementaires : elle inclurait, un montant à ne pas dépasser, elle serait votée au vu, d'une analyse par la Cour des Comptes, et l'emploi de cette dette serait également présenté par les services de l'Etat. 

- une autre étape est nécessaire : en fait, la dette de la France, n'a une valeur relative que par rapport à la situation comparée de ses partenaires : la crise financière nous l'a montré, nous allons payé 15 milliards pour la Grèce. Faire du montant de la dette européenne, un sujet "annuel" de débat politique au sein de la construction européenne. Sans aller, jusqu'à la codécision avec le Parlement, qui choquerait sans doute, les contempteurs de l'Europe, à tous le moins, un vote d'un minimum de parlementaires européens serait de bon aloi.

Régis



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